Vous avez appris, j'ai appris que lors d'une remontée rapide, les tables MN90 imposaient ceci :
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"Si la vitesse de remontée > 17 m / min il faut, dés l'arrivée en surface et en moins de 3 min, redescendre
à la 1/2 profondeur maximale atteinte de la plongée pour y effectuer un palier de 5 min et déterminer la décompression à suivre en prenant comme durée le temps écoulé depuis le début de la
plongée jusqu'à la fin du palier de 5 min et comme profondeur la profondeur maximale atteinte. Si la décompression déterminée ne prévoit aucun palier, effectuer un palier minimum de 2 min à 3
m."
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Pourquoi mi-profondeur ?
Pourquoi 5 minutes de palier ?
Pourquoi 3 minutes max en surface ?
J'avoue avoir eu parfois du mal à m'endormir (1)
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Un tout cht'it rappel
En 1907, la Royal Navy demande à un physiologiste de renom, John Scott HALDANE, d'élaborer des procédures de
décompression pour la plongée à l'air. Ses travaux, heureusement améliorés, servent de base à nos MN90 actuelles.
Le principe est d'assimiler le corps humain à un ensemble de familles de tissus comparables à des "espèces
d'éponge à azote" et de capacité d'absorbtion différente pour chacun. L'azote est respiré, passe dans le sang qui le véhicule jusqu'aux différents tissus. La capacité d'absorbtion (ou
d'élimination) d'un tissu considéré s'appelle le taux de perfusion et est fonction du volume du tissu et du volume de sang qui le traverse.
Un tissu va donc se saturer en azote en fonction de sa capacité d'absorbtion et du gradient de pression
différentielle entre ce tissu et le sang (qui est rapidement saturé en azote à la pression de l'air respiré).
Le taux de perfusion n'est pas un paramètre facile à utiliser, on va plutôt en déduire le temps nécessaire à un
tissu donné pour évoluer de la moitié du gradient de pression différentielle (Ex : le sang est saturé à 2b de PpN2, le tissu "X" est saturé à 1b de PpN2, s'il faut 20 mn à ce tissu pour être
saturé à 1.5b de PpN2 on dira que c'est un tissu de période "20mn").
Les MN90 sont réalisées à partir d'un modèle de 12 tissus, ou compartiments.
Lors de la remontée, l'écart entre la pression partielle d'azote d'un compartiment (Tension d'azote) et la
pression hydrostatique ambiante (Pabs) augmente. La vitesse de remontée doit être limitée, voire stoppée (paliers) afin de ne pas atteindre un seuil, dit "seuil de sursaturation critique" (Sc)
qui est propre à chaque compartiment et qui marque le début d'apparition de bulles dans le tissu / compartiment considéré.
Un profil de remontée doit donc toujours garantir que, pour tous les tissus :
TN2 / Pabs < Sc
Vous êtes toujours là ??
Pas encore trop dégoutés ?
Bon, on en
revient à nos moutons : sortez les calculettes !
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Lors d'une remontée rapide, certains tissus peuvent dépasser ce seuil de sursaturation critique et conduire à
l'apparition de bulles (dégazage anarchique).
Pour limiter les risques, il faut redescendre au plus tôt à une profondeur où l'on n'atteint plus le seuil de
sursaturation critique du tissu directeur (celui qui est le plus proche de Sc). Il faudra donc descendre à une profondeur où :
Pabs > TN2 / Sc
Le cas le plus pénalisant serait celui où le tissu le plus long à se saturer (120mn) se serait complètement
saturé à la profondeur maximale atteinte (correspondant à Pabs max). Ce tissu a un seuil de sursaturation critique de 1.54.
La tension d'azote dans ce tissu est égale à : TN2 = Pabs max x 0.8 (on respire de l'air constitué de 80%
d'azote). Donc pour éviter le dégazage dans ce tissu 120mn, il faut redescendre à une profondeur telle que :
(Pabs max de la plongée x 0,8) / Pabs minimum = 1,54
ou
Pabs max de la plongée x 0.519 = Pabs min (la surface donc)
Il faudra donc redescendre une profondeur correspondant à 0.52 fois la pression absolue de la profondeur
maximale. Pour simplifier et prendre une petite marge de sécurité, on a arrondi à 0.5 fois la prof max.
Les limites de ce calcul et donc de la procédure
Cette procédure basée sur un calcul théorique prend plusieurs hypothèses au niveau physiologique :
1) Le temps en surface inférieur à 3 mn est suffisamment court pour ne pas permettre le dégazage et l’apparition en nombre important et pathogènes de bulles dans la circulation,
2) Le temps passé (5 mn) à mi profondeur est suffisant pour permettre l’élimination par la circulation et la ventilation des bulles existantes issues de la remontée rapide,
3) Le modèle Haldanien s’applique.
Or les études récentes montrent qu’il y a apparition de bulles (a partir de noyaux gazeux de CO2) tout au long de la plongée, favorisée par certains paramètres : effort, hyperventilation, vitesse
de remontée rapide, pression ambiante ............. donc :
Evitez les remontées rapides !
(1) Non ! j'déconne !!
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Article réalisé à partir du cours "Utilisation des MN90 du CIPL" et du corrigé de l'examen "MF2 de Niolon
de Septembre 2009".